Journées d'Etude RLSF'01 "Recherches sur la Langue des Signes" , IRIT-Université Paul Sabatier, 23-24 novembre 2001

Scolarité en langue des signes : impact sur l'évolution de la langue des signes

IRIS - Groupe Etudes et Recherches :

Jean-Louis Brugeille, Patrice Dalle, Brigitte El Khomsi, Guillemette Jausions, Fabrice Lucas

Texte complet de la présentation à RLSF'01

Résumé

La scolarité en langue des signes crée une double exigence : celle d'utiliser un vocabulaire académique en langue des signes, exact et précis, pour transmettre les notions, et celle de permettre des interactions riches et élaborées des élèves entre eux ou avec leurs professeurs. Dans les deux cas, la langue des signes doit évoluer, pour pouvoir être employée dans des niveaux scolaires où elle a été peu utilisée (lycée) et pour être en phase avec l'augmentation des connaissances et l'évolution de la société ;

La scolarité collective en langue des signes, c'est-à-dire l'enseignement direct en langue des signes à des classes homogènes d'élèves sourds, permet de satisfaire cette double exigence. De plus elle est un facteur essentiel pour que ces deux objectifs, niveau de langue et niveau d'interaction, soient respectés de manière durable.

a- Evolution de la langue des signes - activité de néologisme

A partir d'exemples de situations scolaires rencontrées dans des classes d'enseignement en langue des signes, nous illustrons les différentes stratégies utilisées par les enseignants et par les élèves pour enrichir le vocabulaire en langue des signes, dans chaque discipline. Nous montrons la difficulté de réaliser les mêmes démarches en situation d'intégration individuelle avec interprète. Enfin nous soulignons le travail complémentaire qui doit être fait pour valider, fixer et diffuser ce vocabulaire et nous illustrons ce propos par le travail actuellement mené à l'IUFM de Toulouse.

b- Enrichissement durable de la langue des signes et du niveau culturel des sourds.

Nous présentons d'abord un certain nombre d'exemples, où l'introduction de nouvelles connaissances a nécessité la création de nouveaux signes dans une classe, et où , grâce à la simple transmission des élèves plus âgés vers les plus jeunes, ces signes, et les concepts associés, étaient déjà connus des élèves de la promotion suivante, sans l'intervention de l'enseignant.

Nous analysons les conditions qui rendent possible un tel enrichissement culturel et qui favorisent sa pérennité. Nous montrons que la notion de "collectif", concernant aussi bien les élèves que les enseignants, est fondamentale dans ces conditions. Cela induit les notions de classe et de filière, pour ce qui concerne l'organisation scolaire, et de langue vivante et de communauté sourde pour ce qui concerne l'articulation entre la vie scolaire des élèves (et des enseignants) et leur vie sociale.

 

En conclusion, nous affirmons que la réduction de la langue des signes à un simple rôle d'outil de transmission des informations, et la préconisation de l'intégration scolaire individuelle comme principe d'organisation scolaire sont deux éléments qui empêchent le développement de la langue des signes et son évolution en phase avec la société et sont donc des freins au développement culturel des jeunes sourds.