Recherche-Formation

Pédagogie en L.S.

Réunion du 31 mai 2001

Présents : Jean-Louis Brugeille, Guillemette Jausions , Brigitte El Khomsi, Fabrice Lucas, Myriam Kebbati, Patrice Dalle

Ordre du jour :

- Rapport de fin d'année et définition du projet de recherche
- Préparation de la journée du 28 juin organisée par le Rectorat sur la scolarité en LS

I. Préparation du rapport de fin de première année.

1.Cadre général du projet

Le rapport de 1ère année sert à élaborer le projet de recherche. Il comprendra donc :

- un exposé du cadre de l'étude (LSF, enseignement en LSF, situation actuelle)
- le choix du thème : l'évaluation
- la justification de ce choix (voir le projet de rapport)
- la méthodologie proposée pour mener l'étude au cours des années 2 et 3
- bibliographie et identification des recherches menées sur le même thème par d'autres équipes.

Le bilan du travail mené sur les évaluations au cours de cette première année est intéressant , mais il a aussi fait apparaître la nécessité de définir un protocole plus élaboré :

- protocole de recueil des évaluations
- méthode d'analyse

- la 2ème année aura pour objectif de décrire la pédagogie en LS, à travers les évaluations :

- descriptif
- relevé de problèmes

- la 3ème année consistera à sélectionner certains problèmes observés et à mener une recherche visant à proposer des "solutions" :

Le résultat sera sous la forme d'un rapport avec une vidéo :
- observations,
- analyse des causes
- propositions sur ce qui constitue la pédagogoie en LS, c'est-à-dire :
- objectifs
- organisation
- acteurs
- programme
- pédagogie
- évaluation

2.Etude de la méthodologie d'analyse des évaluations

2.1. Trois étapes

1- Organisation des évaluations

2- Analyse:

- Méthode d'observation (dépouillement) : définition des critères
- Synthèse

3- Interprétation - Retour sur les objectifs :
L'évaluation fournit un éclairage sur :

- les objectifs de l'enseignement, notion de niveau, de norme
- les programmes
- la pédagogie
- l'évaluation
- le rôle des deux langues.

 

2.2. Détail

Comme dans toute recherche, ces observations et leur analyse sont faites en fonction d'hypothèses que l'on cherche à vérifier.

A. Hypothèse :

L'enseignement en LS à des Sourds est un révélateur des problèmes que l'on retrouve dans toute situation d'enseignement.
Les solutions mises en oeuvre pour résoudre ces problèmes devraient être transférables au cadre général.

- Un révélateur, pourquoi ?

- Enseignement en LS
Dans toute situation d'enseignement en français, il y a 2 modalités en présence, l'oral et l'écrit. L'enseignement fait surtout appel à l'oral alors que les évaluations et les examens se font presque entièrement par écrit. On fait souvent comme s'il n'y avait pas de différences entre ces deux modalités alors qu'elles ont un fonctionnement tellement spécifique que certains spécialistes vont jusqu'à dire qu'il s'agit de deux langues différentes. Or les élèves n'ont pas du tout la même maîtrise dans les deux modalités.

Dans l'enseignement en langue des signes, cette différence est beaucoup plus marquée, puisqu'il s'agit vraiment de 2 langues très différentes : l'oral est en LS (qui n'a pas d'écrit) et l'écrit est le plus souvent en français (dont la modalité orale n'est pas accessible aux élèves). La LS peut aussi jouer un rôle proche de l'écrit, lorsque les élèves enregistrent leur production en vidéo : on est bien en situation de communication différée et le référent étant extérieur à la situation, l'élève doit expliciter les catégories de temps, de lieu et de personnes. De plus, dans cette situation, on constate que le registre de langue des signes évolue vers un registre plus littéraire.

On voit donc clairement apparaître les implications des langues et de leurs modalités sur la transmission des connaissances, sur les interactions dans la classe et sur les évaluations.

- Enseignement à des Sourds
Dans leur pratique pédagogique, les enseignants ne doivent pas s'intéresser qu'à la matière et au programme mais aussi aux particularités de chaque élève (et pas seulement à leur niveau scolaire). Cette exigence n'est pas facile à respecter lorsque l'effectif est nombreux.

Les élèves sourds ont une perception particulière, purement visuelle, une culture propre et ils appartiennent à une minorité linguistique. De plus, dans la situation scolaire actuelle, ils ont souvent un niveau de connaissances et de culture générale insuffisant.

Là aussi, les enseignants ne peuvent pas ne pas prendre en compte ces particularités. Ils mettent donc en oeuvre une pédagogie centrée sur l'élève, comme le recommandent les directives ministérielles. Et lorsqu'ils n'y parviennent pas (pour différentes raisons), les conséquences apparaissent immédiatement.

- Des problèmes à identifier et à analyser

Du fait du caractère plus marqué de cette situation d'enseignement, les problèmes y apparaissent de manière plus aigue. Leur prise en compte a donc un caractère impératif. Sur le terrain, les enseignants mettent en oeuvre des stratégies plus ou moins empiriques, souvent avec succès.
Il faut donc agir sur deux plans :
- d'une part identifier les problèmes et essayer de les réduire lorsque l'on peut agir sur leur origine, en définissant la meilleure organisation scolaire pour ces élèves (en particulier l'adéquation enseignant - élève sur les questions de langue et de culture)
- d'autre part analyser ces problèmes et proposer un cadre méthodologique pour la pédagogie à appliquer, ce qui est l'objet de cette recherche.

- Un caractère transférable

Du fait de cette différence marquée entre écrit et oral dans l'enseignement en LS, les enseignants sont obligés d'en tenir compte explicitement dans leur pédagogie et dans leur manière d'évaluer les élèves. Ils développent des stratégies particulières pour la présentation des concepts, des connaissances et des techniques, pour la conduite des interactions et l'expression des élèves dans la classe, pour la gestion du tableau, pour la prise de note, pour la forme des devoirs et pour les évaluations.

Les problèmes rencontrés dans l'enseignement aux élèves sourds sont révélateurs de problèmes qui dépassent le cadre des sourds; on trouve d'ailleurs beaucoup d'analogie avec les situations de classes accueillant un fort pourcentage d'élèves d'origine étrangère ou avec les classes des zones prioritaires, où là aussi les questions de langue, de culture ou de connaissance générales sont primordiales.
Les pratiques pédagogiques développées pour trouver ce qui convient le mieux à chaque élève sont donc probablement transférables.

Au cours de la 2ème année, l'analyse et l'interprétation des évaluations seront donc menées avec ce fil conducteur :

- quels problèmes révèlent-elles ?
- quels rôles y jouent les langues, la spécificité des élèves en matière de perception, la culture, le niveau de connaissances général, la pédagogie utilisée, la spécificité de l'enseignant ?
- quelle relation avec la pédagogie pratiquée ?
- est-ce que le problème révélé (et ses causes) est généralisable ?

La 3 ème année sera consacrée à la sélection d'un nombre limité de problèmes, à la recherche de solution et à l'étude de leur caractère transférable.

B. Méthodologie

1- Protocole d'organisation des évaluations

On utilisera des évaluations normales faites en cours (l'organisation d'évaluations particulières biaiserait les résultats de l'analyse).

Elles doivent concerner plusieurs niveaux : primaire, collège, lycée et filière professionnelle (CFA)
La participation d'enseignant du primaire pourrait se faire via IRIS, dans le cadre d'un partenariat conventionné.

On recueillera en parallèle un certain nombre d'informations destinées à faciliter l'interprétation des évaluations :

- information sur le déroulement de l'épreuve (durée, ...)
- document sur l'épreuve : vidéo, brouillons
- information sur l'élève : niveau de langues, ...
- information sur l'enseignant : niveau de langue et niveau académique (dans la matière enseignée et en général)
- type de pédagogie (ex : par activité de découverte ou par exposé de la théorie suivie d'exercices d'application)
- manière dont ont été données les connaissances (cours magistral, exercices, analyse collective, ...) et langue de transmission utilisée, en le précisant pour chaque point évalué de la séquence.
Par exemple, dans un cours d'histoire sur le fascisme :

Séquence
Pédagogie
Evaluation finale

- Cours : le fascisme (histoire ,naissance, ...)

- LS + synthèse écrite par le professeur

Ecrite, avec :

- question de cours
- question sur la doctrine fasciste
- analyse de document visuel

Documentation sur l'idéologie fasciste

Ecrit + questions + correction

Documentation sur la propagande

Analyse en LS d'une affiche

2- Analyse:

3- Interprétation

En fin d'année, essayer d'identifier des causes.

Rapport de fin de 2ème année :

- une analysse "fine" des problèmes révélés par les évaluations (photographie)
- une tentative d'exploitation (cause des problèmes)
- une étude du caractère général de ces problèmes et de leurs causes

=> Préparation du travail de la 3ème année sur la proposition de solutions

- problème -----> cause -----> hypothèse -----> expérimentation ----> bilan et nouvelle évaluation

- caractère transférable de ces dispositions

==> proposition : une pédagogie pour l'enseignement en LS à des élèves sourds

C- Organisation de la 2ème année

Rappel : la 2ème année du dispositif Recherche-Formtion compoorte 10 demi journées (organisées en journées entières ou en demi-journées) et mes
Les participants bénéficient de 0,75 HSA

Proposition de planning (en reconduisant la date du jeudi)

Date
Nombre de
1/2 journées
Thème

27 septembre

1

- valider les critères complets en analysant l'évaluation de Biologie 1ère ES : vidéo + texte (Fabrice)

- organisation des 1ères évaluations (mise au point du protocole)

29 novembre

1

Première série d'analyses
Identifier les problèmes

=> bilan : nouvelles hypothèses => préparer évaluations de confirmation

13 décembre

2

17 janvier

1

14mars

1

Deuxième série d'analyses
Expliquer les problèmes

Préparation du rapport

4 avril

1

25 avril

2

16 mai

1

Bilan, Rapport
Préparation de la 3ème année

Rappel : on peut faire venir un intervenant extérieur pour un exposé, une formation.

Par exemple Alain Bentolila, linguiste, auteur de "De l'illetrisme en général et de l'école en particulier" et membre de l'Observatoire national de la lecture.

 

2. Préparation de la journée organisée par le rectorat le 28 juin

Le 11 mai, Madame Mokrani (chef de la DOGE au rectorat) a proposé d'organiser une journée sur la scolarité en LS, commençant par des interventions des associations pour expliquer la surdité et justifier l'approche bilingue, puis consacrée à la scolarité, avec différents types d'intervention (vidéos, profs, administrations) pour finir par une évaluation des besoins et l'organisation dupartenariat qui permettra de fonctionner correctement. IRIS a proposé que le groupe de recherche de l'IUFM intervienne pour expliquer les recherches en cours.

Proposition de planning (les heures sont données à titre indicatif pour donner un ordre de grandeur des durées)

9h Quoi :

- Qu'est-ce que vivre sourd : par IRIS
But : faire bien comprendre la problématique de la surdité, où sont les vrais problèmes et les vraies priorités. Comment vivent les sourds. Sourd-citoyen.

- Le choix d'une éducation bilingue par l'APES

But : montrer que c'est un choix de vie et non de technique, un autre regard sur l'enfant sourd. C'est aussi le choix des parents et il ne se discute pas.

Cette présentation doit permettre de clarifier certains termes :

- intégration : ne pas confondre l'objectif d'intégration sociale (qui est un acte personnel) et l'organisation scolaire
- bilinguisme : ne pas confondre l'objectif pour l'enfant (devenir une personne bilingue) et l'usage des langues dans la scolarité
- langue première : quel est la langue dans laquelle l'enfant se structure, construit sa pensée, découvre la fonction langagière ?

=> pour conclure à la nécessité d'une organisation de la scolarité qui soit cohérente avec le choix éducatif des parents et qui le respecte :
- respect de leur choix de langue : un enseignement en langue des signes à des groupes de sourds (pour que ce soit une langue vivante et non un outil de passage d'information)
- respect de leur choix de vie : un enseignement en milieu ordinaire, car le jeune sourd est un enfant comme les autres, intégré dans la société.
- respect de leur projet éducatif : une vraie scolarité, avec les mêmes objectifs, les mêmes possibilités d'orientation que les autres élèves, avec une pédagogie centrée sur l'élève et de qualité (professeurs comprenant les élèves, enseignement direct).

Tout le reste du débat suppose donc que ces points sont admis et que le seul problème est de savoir comment organiser une scolarité qui réponde au mieux à cette demande (et non de discuter pour savoir si cette demande est justifiée)

 

11h : Comment enseigner

- Intervention de l'IUFM

La question qui se pose aux enseignants est donc de déterminer ce que devient l'acte pédagogique dans ce type de scolarité : qu'est-ce que ça change ? Comment enseigner en LS à une classe d'élèves sourds dans un établissement ordinaire.

Sachant qu'il faut poser cette question à deux niveaux :
- le niveau théorique : l'enseignement en LS, le rôle des deux langues
- le niveau pratique, qui prend en compte la réalité actuelle des élèves, des enseignants, des structures, des programmes, des outils pédagogiques, des moyens, etc ..., ce qui peut conduire à prendre provisoirement des dispositions qui dérogent aux principes.

- Résumé des études menées sur l'enseignement en LS
- Présentation des actions en cours à l'IUFM : justification, thèmes étudiés et participants
- L'Atelier d'Analyse des Pratiques , sur les néologismes, par JL Brugeille
- L'action Recherche-Formation, sur la pédagogie en LS, par P. Dalle

14h : Comment ça se passe dans la réalité

Exemples de terrain

- Présentation d'une vidéo sur une classe primaire par IRIS

- Témoignages d'enseignants (avec présentation de documents, vidéo, ...)

- dans différentes situations d'enseignement :
- Sourd enseignant en LS
- Entendant enseignant directement en LS
- Entendant enseignant en français, avec interprète, à une classe de sourds
- Entendant enseignant en français, avec interprète, à un ou des sourds intégrés dans une classe ordinaire.

- à différents niveaux (primaire, collège, lycée, université) et dans différent type de discipline (scientifique, littéraire, technique)

- Témoignage des élèves

- délégués des élèves (sourds et entendants) de lycée
- étudiants à l'université : comment ça se passe après le lycée ?

- Témoignages d'intervenants dans le cursus scolaire des élèves sourds : CCPE, AIS, médecine scolaire, ...

- Acteurs du partenariat

16h : Evaluation, expression des besoins

- Quels besoins
- dans les clesses : questions de pédagogie, de formation, de recrutement
- dans les établissements : l'accueil d'un groupe d'élèves sourds, la vie scolaire
- dans le cursus complet : les relations inter-établissement, les orientations, l'environnement

- Quelles solutions ?

- pédagogie : recherche (IUFM, autre), formation (Mme Bonnal, IRIS, …), documents pédagogiques (IRIS, CRDP,…)
- recrutement
- les établissements d'accueil, l'accès à des filières diversifiées.

- Dans quel cadre : rappel de la circulaire rectorale et des différents textes précisant les conditions d'accueil et le partenariat (CLIS, UPI, SSEFIS,…)

- avec qui : le Partenariat

 

Trame de notre intervention :

Notre hypothèse : l'enseignement en LS ne crée pas de problème particulier, il révèle, parce qu'ils y sont plus aigus, les problèmes rencontrés dans toute situation d'enseignement. Donc il n'y aurait as matière à mettre en place une pédagoie très spécifique.

En pratique la situation actuelle de l'enseignement aux jeunes sourds :

- LS peu utilisée dans l'enseignement =>
- vocabulaire technique insuffisant => action IUFM sur les néologismes
- peu de documents pédagogiques

- Pas de référentiel sur la pédagogie => recherche IUFM pour vérifier l'hypothèse et pour établir ce référentiel

- Pas assez de professeurs formés pour ce type s'enseignement

- Effectifs des classes insuffisants

- Élèves ayant eu un parcours antérieur pas cohérent avec la scolarité en LS